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Un spectacle dans la lignée du théâtre de l’intime. Redoutablement captivant et expressément signifiant des combats intérieurs touchant des êtres censés se reconnaitre et s’aimer. Une pièce prégnante de Charif Ghattas sur les relations fraternelles fragilisées voire rompues de l’histoire des trois sœurs réunies ici pour l’ultime souvenir familial. Une écriture qui déroule le fil narratif en resserrant toujours plus les tensions ambiantes palpables dès la première scène, jusqu’à les rendre irrévocables.

« Dans un hôtel de Rotterdam, trois sœurs sont réunies au chevet de leur mère. Elles voudraient se rapprocher mais n’y arrivent pas. Elles voudraient éviter la rupture sans y parvenir. Au cœur de ce chaos âpre et silencieux vont pourtant affleurer les immortels souvenirs d’une enfance passée les unes avec les autres. »

Dans un flot de phrases piquantes voire assassines, parmi des silences qui parlent, des regards qui crient et des mots qui pleurent, le récit est revêtu d’une densité émotionnelle formidablement incarnée par les trois comédiennes Elisabeth Bouchaud, Coralie Emilion-Languille et Pauline Ziadé. Elles arrivent chacune à nous embarquer dans les souffrances de leurs personnages, à nous faire vivre les affres de leurs désirs impossibles de remédiation et à assister à la brutalité des tentatives échouées de rapprochements, les condamnant à la mélancolie de la rupture.

Puisque se dire ne peut pas se faire et qu’aucun mot ne pourra suffire à la réparation, Mire, Rita et Diane seront-elles vouées à se méprendre dans le doute et se terrer pour ne plus être rongées par les rancœurs et les regrets, les rancunes et les remords ? Serait-ce l’égoïsme ou le renfermement sur soi qui conduit à ce déni de l’autre ? La névrose rampante d’une enfance chargée qui nourrit l’empêchement ? On ne sait pas, le saura-t-on ? On assiste, on voit et on pense.

La mise en scène de l’auteur, sobre et dépouillée, est centrée sur l’énonciation du texte et sa mise en vie. Le décor de Laure Montagné est simple et beau, lui aussi restreint à l’essentiel. L’ensemble est éclairé par Paul Hourlier avec des jeux de clairs obscurs adroitement appliqués. Mais la pièce repose avant tout, le texte l’oblige, sur l’intensité troublante de l’interprétation, purement remarquable.

Un spectacle fort et marquant, au texte percutant et à la mise en vie habile, magnifiquement interprété. À voir sans hésiter, je le recommande vivement.

 

Spectacle vu le 19 septembre 2021

Frédéric Perez

 

Texte et mise en scène de Charif Ghattas. Scénographie de Laure Montagné. Lumières de Paul Hourlier.

Avec Elisabeth Bouchaud, Coralie Emilion-Languille et Pauline Ziadé.

 

 

Jusqu’au 17 octobre

Mercredi et vendredi à 21h00, dimanche à 16h00

 

2 bis passage Ruelle, Paris 18ème

01.40.05.06.96  www.reineblanche.com

 

Photo © Pascal Gely

Photo © Pascal Gely

Photo © Pascal Gely

Photo © Pascal Gely

Photo © Pascal Gely

Photo © Pascal Gely

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