Voici un spectacle singulier. Rieur et léger au demeurant, il attise tout le long une émotion palpable. Le verfügbar aux enfers est une pièce de théâtre musical des plus inattendues et sans doute unique en son genre puisqu'elle est écrite clandestinement par Germaine Tillion pendant sa détention au camp de concentration de Ravensbrück en 1944.
Claudine Van Beneden relève avec réussite la gageure d’adapter et de représenter aujourd’hui cette œuvre marquée par sa force mémorielle. Elle nous donne à voir et entendre tout ce que le texte décrit de l’enfer de la détention, par le rire et l’autodérision avec des scènes jouées entremêlées de numéros chantés et dansés, façon revue de music-hall. "Lorsque j’ai découvert ce texte" dit-elle "j’ai été éblouie par cette capacité de création qu’avaient les femmes dans les camps. Créer signifiait lutter, espérer et vouloir vivre."
Un humour féroce et sans concession traverse les situations et les répliques. La magie du spectacle opère, c’est drôle et percutant. Le message de révolte passe. La duperie volontaire de cette entreprise détonne et son émerveillement explose et se répand jusqu’à nous, charriant son lot d’émotion et de colère.
Mais avant tout et c’est tant mieux, le spectacle est bien là. Lumineux, drôle, calé au cordeau et superbement interprété par Solène Angeloni, Angeline Bouille, Isabelle Desmero, Raphaël Fernandez, Barbara Galtier et Claudine Van Beneden. Convaincants, crédibles et fougueux à souhait.
Un moment de théâtre qui se veut une moment de joie partagée et ça fonctionne ! Émus sans doute mais ravis par ce spectacle qui allie plaisir et témoignage, conscience et émotion.
Les spectateurs ressortent le regard fixe et éveillé, le sourire aux lèvres et pour certains dont je suis, les yeux mouillés, allez savoir pourquoi. Étonnant et captivant spectacle. Incontournable rendez-vous.
Spectacle vu le 16 juillet 2022
Frédéric Perez
Adaptation et mise en scène Claudine Van Beneden. Arrangements musicaux Grégoire Béranger et Jean Adam. Scénographie Blandine Vieillot. Costume Marie Ampe. Son Manu Giroud. Création lumières Hervé Bontemps. Régie lumières Clémentine Gaud et Benjamin Duprat. Chorégraphie Jérémy Pappalardo.
Avec Solène Angeloni, Angeline Bouille, Isabelle Desmero, Raphaël Fernandez, Barbara Galtier et Claudine Van Beneden.
Musicien Grégoire Béranger.
Jusqu’au 30 juillet à 10h30
(relâche le mardi)