« Vivre envers et contre tout ! » : Extraite du spectacle, cette formule en forme de devise est sans doute le symbole de la revanche d'Hugo, ce prisonnier du silence, qui s’est réfugié longtemps dans ses rêves pour ne pas vivre ceux que le monde lui imposait. Hugo était un jeune enfant autiste qui finit par trouver sa place parmi les autres, après de longues luttes, grâce au soutien acharné de sa mère et à son propre combat.
Devenu adulte, il choisit l’écriture puis le théâtre pour raconter son histoire, comme pour y accomplir sa propre catharsis sublimée et rédemptrice. Il nous confie avec chaleur et conviction les bribes importantes de sa vie d'autiste comme une recréation magnifique. Il rejoue ses souffrances, ses désespoirs et ses humiliations. Il nous montre sa puissante détermination. Il nous aide à comprendre les torrents d’impossibles et les brouillards de doutes qui ont parsemé son parcours. Il nous fait partager l’amour profond entre sa mère et lui, qui nous apparait comme une motivation majeure du chemin vers cette bouleversante quête de réussite.
La mise en scène de Vincent Poirier apporte une théâtralité simple et particulièrement adroite pour permettre à la fois la mise en abyme du récit et l'installation d'une distance avec le public pour ne pas sombrer dans une sorte de compassion vaine aux allures de pathos.
Deux comédiens nous racontent cette histoire. Hugo Horiot lui-même et Clémence Colin, comédienne sourde qui exprime son jeu tout en finesse, utilisant par ailleurs la langue des signes. L’altération de la parole dans le jeu entre les deux personnages renforce la puissance des messages et des émotions. Rien ne peut plus empêcher la communication. Ils semblent jouer tous les deux à s’interpréter l’un l’autre. Nous ne savons pas quand ils se parlent et quand ils traversent ensemble le mur du silence.
Le choix de la présence de la comédienne utilisant la langue française des signes rend un singulier et original hommage à la communication entre les êtres quels que soient leurs différences, leurs handicaps ou leurs difficultés. Nous avons là une attention significative du metteur en scène, à saluer.
Les émotions nous chavirent et confluent jusqu’à la fin du spectacle. Colères sourdes et impuissantes face aux indécents obstacles pour permettre à un enfant de vivre parmi les autres malgré sa différence ; doutes rongeurs devant ces voies semées d’embuche empêchant de toucher le possible et enfin, espérances fragiles lorsque arrivent les premiers signes annonciateurs de réussite.
Un spectacle impressionnant par son texte et par ses jeux, terriblement beau dans l’illustration, à l'esthétique violente, de ce combat digne et incroyable. Nous avons là un incontournable et bouleversant témoignage à partager le plus possible. Pour la lutte incessante et nécessaire contre l’intolérance des différences, contre l'exclusion sous toutes ses formes et pour contribuer à l’apprentissage et au respect du vivre-ensemble. Un spectacle émouvant et captivant à ne surtout pas manquer.
De Hugo Horiot. Mise en scène de Vincent Poirier. Avec Hugo Horiot et Clémence Colin. Ce spectacle est joué en langue des signes par la comédienne elle-même.