Attention ! Voici une nouvelle perle théâtrale de la saison. William Mesguich frappe à nouveau fort et bon avec ce spectacle aussi extraordinaire que touchant, d’une intensité incroyable, qui nous cueille et ne nous lâche pas.
Nous sommes emportés dans un ailleurs possible où les pensées virevoltent autour de nous, les réflexions nous surprennent de leur véracité, les impressions de beauté nous saisissent et percent de leurs sensations l’émotion qui s’approche tout près.
« William Mesguich nous fait revivre sur scène l’expérience exceptionnelle de l’écrivain-aventurier Sylvain Tesson. Parti loin de la cité et de la foule, il fait le choix de s’isoler au milieu des forêts de Sibérie, là où ses seules occupations sont de pêcher pour se nourrir, de couper du bois pour se chauffer. Il réapprend le bonheur de la lecture et de la réflexion solitaires. »
Comme une pause au milieu de la quotidienneté, les mots charrient leur utopie, les situations leur fantastique et une forme de poétique de l’énonciation s’installe pour nous envelopper et faire chavirer nos habitudes et nos repères.
Un moment de théâtre où la parole de l’auteur se trouve sublimée par la narration et l’incarnation de son texte, dans une féerie d’images et de pensées. Un moment magique, qui tient du merveilleux. Un moment de partage particulièrement bienfaisant qui tisse progressivement un voile de bonheur. Nous sortons touchés et heureux d’avoir « vécu » cette évasion au pays de soi, ces retrouvailles impensables, ces évidences enfouies et étourdissantes une fois mises à jour.
L’adaptation de Charlotte Escamez donne une théâtralité spectaculaire et nécessaire au texte, dont s’empare avec force et finesse William Mesguish dans sa mise en scène et dans son jeu.
Cet immense comédien, rien moins, nous montre à nouveau l’étendue de son talent. Plein d’humour parfois ironique, d’autodérision souvent drôle, il passe de temps heurtés à ceux plus heureux avec une stupéfiante fluidité. Il garde tout le long une présence totalement incarnée qui peut être tonique ou meurtrie selon les traversés de doutes et de souffrances, recueillie et joyeuse plongée dans la solitude ou devant l’immensité. Il sait faire passer les sentiments d’éblouissement devant la pureté et la beauté de la nature, que son personnage souhaite mettre en exergue pour atteindre sans doute la conscience de celles et ceux qui écoutent et veulent bien voir combien il est nécessaire de la préserver.
La scénographie de Grégoire Lemoine, l’univers musical de Maxime Richelme et les lumières de Richard Arselin, entourent et enveloppent le jeu avec la palette de nuances qui convient. Le magnifiant, le floutant ou l’accompagnant avec éclats ou simplicité, gardant au silence son intimité et donnant aux moments d’agitation une exaltation extatique impressionnante.
Un spectacle remarquable. Un texte d’une force inouïe. Une adaptation réussie. Une interprétation solaire qui illumine ce récit chaleureux et captivant. Incontournable spectacle que j’ai plaisir à recommander.
Spectacle vu le 22 octobre 2019,
Frédéric Perez
D’après Sylvain Tesson. Adaptation de Charlotte Escamez. Collaboration artistique d’Estelle Andrea. Mise en scène et jeu William Mesguich. Création sonore de Maxime Richelme. Création lumières de Richard Arselin. Scénographie de Grégoire Lemoine.
À partir du 5 octobre 2020
tous les lundis à 19h00
75 boulevard du Montparnasse, Paris 6ème
01 45 44 50 21 www.theatredepoche-montparnasse.com