François Morel est décidément un très grand homme de spectacle. Il nous montre une nouvelle fois ici toute l’étendue de son talent. Comédien, humoriste ou chanteur, il nous cueille aussitôt et nous stupéfie dans cet hommage délicat et soigné à Raymond Devos, respectant l’artiste et passant ses textes à la moulinette de sa façon, dans un spectacle-bonheur savamment léché.
De l’humour au burlesque comme du caustique à la poésie, nous passons par toutes sortes d’émotions qui nous saisissent, arrivant avec délicatesse, hésitant presque de déranger peut-être et puis qui s’installent et grossissent dans un tonnerre de Brest à Caen ou de Troyes à Sète. Tout partout qu’on ne sait même plus on l’on est et qu’il ne servirait plus à rien de compter.
Une tempête de sourires, une tornade de rires, des fous-rires en éclairs. Ah ça, il y a de la fulgurance dans l’air et du bienfaisant dans les vagues !
C’est bon, si bon qu’il n’y a plus qu’à bien se tenir et ne rien perdre des saillies qui jaillissent, des gags qui fusent et de tous ces moments doux ou brillants qui nous baignent de plaisir. Éclaboussés nous sommes, ruisselant encore à la sortie.
Le plateau pour François Morel, c’est un peu chez lui. Le public, des amis qu’il accueille et qu’il choie. Au théâtre avec lui, on s’y sent bien. Ah le bougre, que nous nous délectons de sa présence lumineuse et toujours partageuse. Nous nous laissons volontiers prendre par ses mains tendues pour voyager le temps du spectacle dans son univers de tendresse, de poésie, d’humour et de rire.
Les mots de Devos, servis à la sauce Morel ? Mais c’est buffet de choix qui nous est offert ! Un buffet des grands jours. Les jours où l’on dresse une belle table avec l’argenterie de famille, où l'on sort les bons vins de la cave.
Des jours heureux où l’absurde pousse les portes et les fenêtres de la raison pour laisser entrer la magie des instants suspendus. Ces instants merveilleux qui invitent à aller de l’autre côté de la réalité, là où tout est possible puisqu’on le décide, où l’improbable devient vraisemblable.
Calé au cordeau, la musique à la bouche ou à l’oreille, avec des effets sonores et visuels particulièrement bienvenus, ce récital pour comédien et pianiste est une plongée hilarante et joyeuse dans l’imaginaire de Raymond Devos, que François Morel transcende si délicieusement.
Un régal de spectacle, drôle et élégant. Du rire intelligent, tendre et redoutablement efficace comme on aime. Incontournable spectacle-bonheur !
Spectacle vu le 6 décembre 2018,
Frédéric Perez
Un spectacle de et avec François Morel.
Textes de Raymond Devos. Avec Antoine Sahler en alternance avec Romain Lemire. Musique d’Antoine Sahler. Assistanat à la mise en scène de Romain Lemire. Lumières d’Alain Paradis. Son de Camille Urvoy. Costumes d’Élisa Ingrassia. Poursuite de Madeleine Loiseau ou Valentin Morel. Conception, fabrication et mise en jeu des marionnettes par Johanna Ehlert, Matthieu Siefridt – Blick Théâtre. Direction technique de Denis Melchers. Archives sonores de l’INA (Radioscopie 1975).
Jusqu’au 5 janvier
Du mardi au samedi à 19h00 et le dimanche à 15h00
Relâches les 24, 25 décembre et 1er janvier
13 boulevard de Strasbourg, Paris 10ème
01.40.03.44.30 www.lascala-paris.com