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Une proposition théâtrale façonnée à partir du roman de Balzac avec une audace tonique et espiègle qui fait ressortir l’humour piquant et l’efficacité des thèmes de cette critique sociale implacable qui interpelle toujours autant. C’est rondement mené, ça dépote et ça tourbillonne.

 

« Derrière la tragédie domestique se révèle la toute-puissance de l'argent qui dirige notre rapport à l'autre. Pour le père Grandet, l'autre n'existe que comme moyen de réaliser quelque profit et tractation financière. Sa fille, Eugénie est une enfant brimée qui, à l’âge de raison, choisit de refuser le monde paternel qu’on lui propose, préférant l’amour à l’argent, l’humanité́ à l’individualisme. Le choix d'Eugénie, à l'heure où le capitalisme semble être le seul modèle de société possible, nous met face à notre propre responsabilité. Qu'est-ce qui dirige notre quotidien ? L'être ou l'avoir ? Balzac apporte un début de réponse : dans les mains d'Eugénie, richissime héritière de son avare de père, l'argent devient un moyen et non un but. »

 

L’adaptation et la mise en scène de Camille de La Guillonnière sèment ses graines sur les sillons de ce genre théâtral moderne particulier, désormais répandu, où des lectures jouées en chorale et des chants polyphoniques se conjuguent pour dérouler le récit ou l’intrigue. La mise en vie ainsi faite est strictement fidèle au roman, avec des coupures certes mais tel qu’il est écrit. Couleurs variées et douceurs posées parmi des effets dynamiques et denses enveloppent le texte partagé entre les interprètes qui ne tiennent pas forcément les mêmes rôles.

 

La moisson est réussie, le grain est beau et les parfums savoureux.

 

La distribution réussit à nous captiver de bout en bout dans cette dénonciation du pouvoir hégémonique de l’argent, du rapport de force entre l’être et l’avoir, du combat entre l’amour et son renoncement. Hélène Bertrand, Lara Boric, Erwann Mozet, Pélagie Papillon, Charles Pommel et Lorine Wolff jouent une partition inédite et savent nous surprendre tout en délicatesse et fougue harmonisées. C’est très bien fait.

 

L’enthousiasme générale passe la rampe et nous emporte dans le récit en faisant ressortir la malice et l’humanité du verbe de Balzac. La puissance du propos est dimensionnée par une mise en scène finement élaborée de la représentation où les messages succèdent aux images avec force. Comme une cavalcade romanesque truffée d’harangues de tréteaux.

 

Un spectacle détonant et ravissant. La critique sociale de Balzac est montrée et démontrée ici avec une précision alerte et volontariste. Un moment de théâtre de troupe bel et bon.

 

Spectacle vu le 12 mars 2020,

Frédéric Perez

 

 

D'après Honoré de Balzac. Adaptation et mise en scène de Camille de La Guillonnière. Assistanat à la mise en scène de Frédéric Lapinsonnière. Lumières de Luc Muscillo. Costumes de Nelly Geyres. Régie de Luc Muscillo ou Johanna Boyer-Dilolo.


Avec Hélène Bertrand, Lara Boric, Erwann Mozet, Pélagie Papillon, Charles Pommel et Lorine Wolff.


 

 

Jusqu’au 29 mars

Du mardi au samedi à 20h00 et le dimanche à 16h00

 

30 rue du Chevaleret, Paris 13ème

01. 45.88.62.22 www.theatre13.com

 

 

EUGÉNIE GRANDET au théâtre 13 Seine
EUGÉNIE GRANDET au théâtre 13 Seine
EUGÉNIE GRANDET au théâtre 13 Seine
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