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Qui est donc ce jeune dandy qui s’approche de nous, au bord du plateau, en début du spectacle ? Souriant et aimable, ce jeune homme nous raconte les plaisirs de la jouissance domestique que lui apportent sa maison, son jardin et le bien-être apparent d’y savourer un repos paisible. Nous en ferions volontiers un voisin, un cousin ou un ami. Pourquoi non ?

Et bien c’est-à-dire… comment dire… ah que c‘est délicat… Bon et bien voilà. Ce joli dandy, certes ébloui par les beautés de la nature, ne semble pas habiter tout seul dans sa tête, voyez-vous ? Oh je me fourvoie peut-être mais il y a des signes qui ne trompent pas. Il perd la caboche je vous dis et lentement mais surement, il va nous le montrer.

Progressivement et irrémédiablement, le narrateur de ce récit va nous faire partager sa descente au plus profond de la folie, celle dont on ne revient pas ou alors pas indemne.

Par petites touches précises et de plus en plus marquées, nous le voyons passer de la mélancolie au déclin lent de la conscience, confondant le vrai et le faux. Les peurs de la nuit et les hallucinations angoissantes prennent le pas sur le doute des souvenirs de rêves devenus cauchemars à force de se répéter. Une forte agitation trouble sa raison, une sourde et vivace démence s’installe.

La folie prend place jusqu’à avoir peur de lui–même ou plus précisément d’un être invisible qui semble fusionner avec lui. Un double transitionnel le livrant à la paranoïa, le Horla l'appelle-t-il. Un être invisible mais présent, hors-de-lui, hors-de-là, étrange étranger qu'il devra combattre et faire périr pour espérer se délivrer enfin. Mais tuer son double ne se peut pas. Il ne reste plus donc qu’une seule chose à faire…

Maupassant publie cette nouvelle en 1887 au moment où il commence à souffrir des complications mentales liées à la syphilis. Fidèle auditeur des cours de Charcot, il s’intéresse aux troubles de la personnalité, au début des soins par l’hypnose. Autant de connaissances qu’il utilise dans ce texte, écrit à la manière d’un journal dans lequel il semble s’adresser au lecteur autant qu’à l’auteur, comme un jeu révélateur de miroir inversé.

La mise en scène de Slimane Kacioui est adroite. Elle insuffle de la légèreté aux premiers pas et sait noircir peu à peu le parcours vers les profondeurs de l’enfermement. Ses indications de jeu semblent efficaces.

Florent Aumaître captive et surprend, magnifiant le texte. Il joue avec une maitrise époustouflante la progression du personnage, avec précision et intensité les troubles émotionnels qui l’emprisonnent. Un travail d’interprétation remarquable.

Voici un spectacle fort, servant avec brio la nouvelle à l’univers fantastique de Maupassant. Un seul en scène rare et réussi. À voir sans hésiter.

 

De Guy de Maupassant.

Mise en scène de Slimane Kacioui.

Avec Florent Aumaître.

 

Le mardi et le mercredi à 19h00 – 38 rue des Mathurins, Paris 8ème – 01.42.65.35.02 – www.theatre-michel.fr

 

- Photo © Virginie Meigné -

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