Un spectacle qui brosse avidement l’impatience fébrile de l'empressement éphémère du désir. Une série de tableaux courts à la manière d’impromptus en prose aux allures d’exercices de style sur l'élan amoureux.
Six jeunes gens et la mère de l'un d'entre eux, amis d'un jour ou de toujours, une nuit d’été que l’on sent vouloir torride, se côtoient, se frôlent, se rapprochent ou s’évincent, composant tour à tour des duos, des trios et un septuor final. Elles et ils joueront des partitions inachevées comme le sont les illusions exaltées, perdues ou gagnées, du désir et de l'attirance, du renoncement et de l'espérance.
Que cherchent-ils tous ainsi ? L'amour là où les émois de la jeunesse le cachent ? Trouver ou retrouver le temps d’une nuit merveilleuse la passion vibrante de l’autre ? Transgresser les tabous pour mieux grandir ou se reconnaître ?
L'auteur Christian Giudicelli créé « un monde flottant » dit-il, pour composer « ce qui tient du rêve éveillé » où chacun des protagonistes est « en quête d'une rencontre » et où tous semblent « jouer au jeu du mensonge et de la vérité » pour mieux investir le songe du plaisir. La poésie comme l'humour traversent les scènes comme pour nous faire oublier que tout ceci pourrait ne pas être qu’une nuit d'été agitée qui attend le « jour qui vient ».
La mise en scène de Jacques Nerson est d’un soin extrême, travaillée jusqu'au moindre détail. Les accessoires, les marionnettes du début et les comédiens se fondent dans une esthétique cohérente servant le texte à merveille, le colorant d’instants suspendus venant nourrir l'imaginaire et l'émotion du public. Les choix dans la mise en place montrent avec une espièglerie astucieuse la maîtrise de la convention théâtrale du faire semblant par la modification des repères du réel. Une dramaturgie qui renforce l’irréalisme poétique qui baigne le spectacle.
La distribution est dirigée avec réussite. Les intonations, les respirations, les postures, les regards et les mouvements relèvent d’une acuité fine et efficace. C'est vraiment très bien joué. Nous sommes pris et conquis jusqu'au bout par les jeux précis, les engagements sincères et l'harmonie qui se dégage de l'ensemble. Léa Dauvergne, Mélik Dridi, Marlène Génissel, Muriel Gaudin, Marie Nègre, Angelo Pattacini et Roman Touminet, montrent avec superbe, sensibilité, enthousiasme et précision. L’émotion passe la rampe. Chapeau bas mesdemoiselles et messieurs.
Songes et mensonges d'une nuit d'été où l’amour se fait fugitif et laisse derrière lui des traînes de passion. Un spectacle touchant et surprenant. Une interprétation saisissante de vérité et de ferveur. À voir sans aucun doute.
Spectacle vu le 8 juin 2019,
Frédéric Perez
Texte de Christian Giudicelli. Mise en scène de Jacques Nerson. Collaboration artistique et conseil à la manipulation de Eric de Sarria. Décor et costumes de Claire Belloc. Construction des marionnettes par Eugenia Piemontese. Lumières de Stéphane Deschamps.
Avec Léa Dauvergne, Mélik Dridi, Marlène Génissel, Muriel Gaudin, Marie Nègre, Angelo Pattacini et Roman Touminet.
Jusqu’au 29 juin
Du mardi au samedi à 19h30
3 rue des Déchargeurs, Paris 1er
01.42.36.00.50 www.les dechargeurs.fr