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Un huis clos intense et coloré qui nous conduit peu à peu à soulever nombre de questions sur le fait et le sentiment amoureux, nous invitant sans qu’on s’en aperçoive à nous interroger sur nous-même et revisiter nos expériences, au travers de ces échanges entre deux hommes dont la rencontre improbable devient peu à peu plausible.

« Qui aime-t-on quand on aime ? Sait-on jamais qui est l’être aimé ? L’amour partagé n’est-il qu’un heureux malentendu ? Autour de ces éternels mystères du sentiment amoureux, deux hommes s’affrontent : Abel Znorko, prix Nobel de littérature, qui vit loin des hommes, sur une île perdue de la mer de Norvège où il ressasse sa passion pour une femme avec laquelle il a échangé une longue correspondance, et Erik Larsen, journaliste qui a pris prétexte d’une interview pour rencontrer l’écrivain. »

Le récit déroule un suspense nourri de rebondissements livrant son lot de révélations et se pare d'une tension quasi diabolique qui se délie peu à peu pour laisser place à une émotion sourde mais vive qui touchera à l'apothéose à la fin.

Tout se complique rapidement dans cette étonnante joute verbale dans laquelle tous deux vont s’opposer sur les raisons d’aimer. Le droit ou le devoir de posséder ou de connaitre l’être aimé ; la préférence de son mystère imaginé ou la réalité de sa présence effective ; le désir de l’autre ou le simple contentement du plaisir de désirer ?

Jusqu’où l'abnégation et la profondeur du sentiment amoureux peuvent-ils influer sur le jugement, la perception voire la falsification du réel ? Vers quelle rationalité limitée tout ceci aboutira ?

La pièce de Éric-Emmanuel Schmitt, comme à son habitude, manie l’humour et l’élégance, la cruauté et la soumission, la fougue et le dépit. Ce texte est magnifique. Il nous emporte dans un univers où la raison et l’émotion se croisent sans cesse, nous touchent et nous troublent.

La mise en scène de Paul-Émile Fourny centre l’attention sur les personnages, y compris celui de la femme qu’on ne verra jamais pourtant. Le duo-duel est subtilement installé, les comédiens doivent s’en départir avec pugnacité et une redoutable finesse pour dérouler le fil narratif. Ils y parviennent brillamment.

Hugo Becker et Pierre Rochefort campent leurs rôles avec aisance et fluidité, utilisant toute un palette de nuances. Ils nous tiennent en haleine et nous surprennent de bout en bout. Une interprétation remarquable.

Un spectacle prégnant piqué d’humour, joué magistralement. Un formidable moment de théâtre, inattendu, riche et émouvant.

Spectacle vu le 14 juillet 2023,

Frédéric Perez

 

De Éric-Emmanuel Schmitt. Mise en scène de Paul-Émile Fourny.  Scénographie et Lumières de Patrick Méeüs. Costumes de Dominique Louis.

Avec Hugo Becker et Pierre Rochefort.

 

 

12h50 - relâche les lundis

 

Photos © Luc Bertau
Photos © Luc Bertau

Photos © Luc Bertau

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