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Une pièce passionnante signée et mise en scène par Arnaud Denis, qui nous parle du théâtre dans le théâtre, d’un auteur et de son personnage, de leurs relations et de leurs cruels rapports de force. L’auteur crée-t-il un personnage pour le laisser vivre et voir jusqu’où il mènera sa vie ? Ou le personnage créé par l’auteur reste-t-il à jamais un être fictif, défini et inamovible, à l’existence figée par le texte ?

Le personnage de Grégoire interrompt la représentation pour interpeller l’auteur et négocier avec lui ce qu’il lui semble impossible de jouer. Nous voici confrontés aux violences d’une rébellion du personnage contre de son auteur, dans laquelle il n’est pas aisé de déceler qui est le double de l’autre, qui créé ni qui est joué vraiment.

Nous partons au quart de tour dans ce voyage en Absurdie grâce à un texte ciselé, riche en rebondissements, qui interroge les rouages de la création d’une pièce. Les situations incongrues et pittoresques comme les répliques sifflantes et caustiques, que traverse l’émotion du tragique, nous tiennent en haleine tout le long, nous touchent autant qu’elles nous surprennent jusqu'à la fin magistrale et inéluctable qui conclut l'intrigue.

La mise en scène est habile, les comédiens jouent dans la salle autant que sur le plateau, Approchant le public au plus près comme pour l’impliquer davantage. Les jeux sont serrés, les émotions surgissent avec intensité. Les comédiens sont tous les trois justes et vibrants. Marcel Philippot brille dans son personnage d’auteur, il nous émeut en nous le montrant intransigeant, sensible et fragile. Audran Cattin joue le personnage désincarné, révélant avec force son désarroi, son effroi et son l’audace. Grégoire Bourbier, très crédible dans son rôle de contre-pouvoir, joue la médiation entre les deux autres personnages avec précision.

Une belle distribution pour une belle pièce. Un très bel hommage au Théâtre et aux questions qu’il pose. Aux côtés des propos sur cet art vivant comme ceux d'Harold Pinter « la vérité au théâtre est à jamais insaisissable » ; d’Arthur Adamov « une pièce de théâtre doit être le lieu où le monde visible et le monde invisible se touchent et se heurtent » ; de Luigi Pirandello « la vie est, en fait, moins réelle que l'art. Une vie n'est jamais, ne peut pas être une création absolue. Alors que l'art est une réalité en soi, hors du temps, des hasards, des obstacles, sans autre fin que lui-même. L'art venge la vie », celui d’Arnaud Denis nous semble résonner en écho : La création théâtrale est-elle le reflet de la réalité ou celui du désir de l’auteur ?

Notre plaisir se nourrit des ressorts de l'intrigue, de ses jeux affutés qui font mouche et de l'intelligence fine de son écriture. Un spectacle remarquable par son propos et sa facture, joué avec brio.

Pièce de Arnaud Denis. Mise en scène par l’auteur assisté de Hédi Tarkani. Décor de Erwan Creff. Lumières de Laurent Béal. Régie de Ider Ahmekhchoun. Avec Marcel Philippot, Audran Cattin et Grégoire Boubier.

Du mardi au vendredi à 21h00, le samedi à 16h00 – 23 rue de la Huchette, Paris 5ème – 01.43.26.38.99 - www.theatre-huchette.com

LE PERSONNAGE DÉSINCARNÉ au Théâtre de la Huchette
LE PERSONNAGE DÉSINCARNÉ au Théâtre de la Huchette
LE PERSONNAGE DÉSINCARNÉ au Théâtre de la Huchette
LE PERSONNAGE DÉSINCARNÉ au Théâtre de la Huchette
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