Le revenu brut mensuel moyen des intermittents a diminué de 400 euros en 2020, selon l’Unédic. Par Sandrine Blanchard dans Le Monde - 9 avril 2021.
(source : revue de presse théâtre de Scoop.it)
"L’étude révèle d’importantes disparités selon les branches, dont les plus touchées sont le spectacle vivant et les prestations techniques.
C’est une étude qui tombe à point nommé. Publiée le 26 mars par l’Unédic, elle analyse « l’impact de la crise sanitaire sur l’emploi des intermittents du spectacle en 2020 ». Alors que la ministre de la culture, Roselyne Bachelot, et la ministre du travail, Elisabeth Borne, devraient recevoir, dans le courant de la semaine prochaine, les conclusions de la mission de diagnostic – confiée à André Gauron, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes – sur les suites à donner à l’année blanche, les chiffres fournis par l’Unédic révèlent d’importantes disparités entre les différentes branches et selon les métiers du secteur culturel.
Sur tout le territoire, les salles de concerts, les cinémas et les théâtres sont fermés au public depuis mars 2020 (hormis une réouverture partielle entre fin juin et fin octobre). Malgré ce contexte, « l’activité globale dans le spectacle intermittent professionnel s’élève, en 2020, à 71 % de l’activité en 2019 », indique l’organisme gestionnaire de l’assurance-chômage. Sans surprise, le spectacle vivant (59 % d’activité en 2020 par rapport à 2019) est généralement plus affecté que le spectacle enregistré (86 %). Derrière ces pourcentages se cachent des écarts considérables. Ainsi, si la production de films d’animation, la radiodiffusion et la production audiovisuelle ont été peu impactées en 2020, à l’inverse, le spectacle vivant privé et les prestations techniques pour la création et l’événement ont vu leur activité tomber respectivement à 50 % et 42 % de celle de 2019.
Du côté des métiers, les plus touchés par la crise sont les professions techniques de la lumière, de l’éclairage, du plateau et de la machinerie, dont l’activité a diminué de moitié par rapport à 2019. Et, parmi les artistes, les musiciens et les chanteurs sont les plus mal lotis, avec seulement 57 % de leur activité habituelle, suivis par les danseurs (61 %).
« Limiter la casse »
Afin de couvrir les allocataires intermittents du spectacle dans l’impossibilité de réaliser les 507 heures de travail indispensables pour ouvrir des droits, Emmanuel Macron annonçait, le 6 mai 2020, la mise en place d’une « année blanche », permettant de prolonger les indemnités chômage jusqu’au 31 août 2021. Qu’en est-il aujourd’hui du nombre d’heures réalisées et de l’évolution des revenus ?
Si la baisse des salaires a été en partie amortie par l’année blanche, « 65 % des allocataires ont cependant vu leur revenu global diminuer », note l’Unédic.
Selon l’étude, « fin décembre 2020, sur les 118 000 intermittents indemnisables et qui ont ouvert leurs droits entre mars 2019 et août 2020, 57 % ont déjà cumulé plus de 507 heures ». Là encore, des différences apparaissent : sur les 58 000 techniciens, 65 % ont cumulé plus de 507 heures, alors que, sur les 60 000 artistes, seuls 50 % ont pu les faire. Surtout, avant la crise, ils étaient globalement 82 % à les réaliser, et donc à être réadmis dans le régime d’allocation.
Sans surprise, le revenu brut mensuel moyen (salaire, plus indemnisation) des intermittents du spectacle a diminué, passant de 2 500 euros en 2019 à 2 100 euros en 2020. Si la part du salaire brut mensuel moyen a fortement chuté (de 1 450 euros en 2019 à 900 euros en 2020), en revanche, le montant d’indemnisation brut mensuel moyen a progressé (1 300 euros en 2020 contre 1 000 euros en 2019). « Au cours de l’année blanche, l’assurance-chômage a joué son rôle, l’indemnisation a permis de limiter la casse sur les revenus », résume Odile Muller, l’une des autrices de l’étude.
Si la baisse des salaires a été en partie amortie, « 65 % des allocataires ont cependant vu leur revenu global diminuer », note l’Unédic. Parmi eux, 25 % enregistrent une baisse de leur pouvoir d’achat de 15 % à 30 %, et, pour 6 %, elle atteint plus de 30 %.
Lorsque le président de la République s’était engagé sur l’année blanche, personne n’imaginait que, onze mois plus tard, le confinement serait toujours d’actualité, et les lieux culturels encore à l’arrêt. Que va-t-il se passer après le 31 août, lorsque l’année blanche s’arrêtera et que la situation des allocataires sera réexaminée ? C’est tout l’enjeu du rapport Gauron, très attendu.
Au regard de l’étude de l’Unédic, on comprend mieux p
ourquoi les ministres de la culture et de l’emploi ont demandé que la mission « différencie l’analyse selon le secteur d’activité concerné, le métier exercé et la date anniversaire des droits des intéressés ». Alors qu’une centaine de théâtres sont actuellement occupés en France pour réclamer l’abrogation de la réforme de l’assurance-chômage, qui va durcir les règles pour tous les chômeurs, la reconduction d’une année blanche pour tous les intermittents semble incertaine."