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Le spectacle nous entraîne dans un univers surprenant où l’intime et le social s'entremêlent pour explorer les aléas des rencontres fortuites et incongrues. Quatre personnages se retrouvent dans le même lieu, à la croisée des chemins entre ombre et lumière. S’ils ne se connaissent pas, ils partagent toutefois la même envie commune, celle de se retrouver seuls pour se confronter à eux-mêmes, braver la vie et jouer avec la mort, rien moins.
« Il est de ces lieux de rencontre improbables. De ces lieux où l'on se retrouve nombreux à vouloir être seuls. Définitivement seuls. Et pourtant... 31 décembre. 23h30. Sur le rebord du toit de la plus haute tour de la ville, il y a Marc, célèbre présentateur télé, rattrapé par une histoire de mœurs. Puis arrive Solange. Puis Maya. Puis Luc. Ils ne se connaissent pas. N'ont aucune envie de faire connaissance. Ils sont tous juste là pour se balancer par-dessus bord. Comment se retrouvent ils à s'engueuler autour d'une pizza ? »
L’adaptation ciselée du roman de Nick Hornby par Christophe Corsand installe une comédie humaine étonnante, où le burlesque frôle l’abîme, où la solitude hurle au milieu des rires et donne vie à une histoire simple et originale maniée avec un humour noir d'une grande justesse. On rit certes mais on rit de ce qui fait mal. L’échec, la honte, l’isolement. Le dialogue est vif, acide et laisse affleurer une humanité touchante au fil de ces rencontres inattendues. La tension monte, les émotions dévoilent les fragilités de chacun face à ses propres troubles.
La mise en scène d’Adeline Messiaen et Christophe Corsand, à la fois précise et sensible, capte avec finesse la complexité des personnages. Par sa justesse, sa sobriété maîtrisée et son intelligence du rythme, elle oscille avec subtilité entre la comédie mordante et le drame existentiel, jouant constamment sur ce fil. Une mise en scène qui ose le burlesque sans verser dans la caricature, qui accueille l’émotion sans tomber dans le pathos.
Les comédiens incarnent avec évidence ces personnages complexes, se mouvant entre vulnérabilité et défi. Leur jeu sincère et nuancé permet de s’identifier à ces figures en quête de sens, fuyant les pièges de la solitude et dressant des résistances fragiles au désespoir. Olivier Doran campe un Marc au bord du gouffre, arrogant, cynique, mais dont les failles percent vite le vernis. Sylvy Ferrus, bouleversante de retenue mais aussi de drôlerie, incarne Solange, figure discrète de la détresse ordinaire. Denis Lefrançois joue Luc, et apporte un humour désarmant à son personnage aussi paumé que généreux. Manon Nobili, dans le rôle de Maya, brûle d’une rage vive, tremblante et belle.
Cette pièce nous parle à bas bruit, avec un humour piquant et salvateur, de ce qui se joue au bord du vide et de ce qui peut permettre de repartir, sans certitude peut-être, mais un peu moins seuls. Une pièce touchante et drôle à l’écriture efficace, une mise en vie fluide et agréable, une interprétation réussie. Une très jolie découverte que je recommande.
Spectacle vu le 24 juillet 2025
Frédéric Perez
De Nick Hornby. Adaptation de Christophe Corsand. Mise en scène de Adeline Messiaen et Christophe Corsand. Dessin de Charles Berberian. Graphisme de Jérôme Vav. Création lumière de Véronique Marsy. Décor de Matthieu Guy d'Arpaillargues. Costumes de Marie Mouchet. Musique de Thomas Lefort. Création son de Julien Boyer.
Avec Olivier Doran, Sylvy Ferrus, Denis Lefrançois et Manon Nobili.
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