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Un spectacle précis et émouvant qui nous permet de retrouver ou de découvrir de la vie et du destin de l’immense artiste Glenn Gould, tout le long d’une fiction-vérité romancée juste comme il faut pour faire théâtre.

Glenn Gould, artiste aux mille et une douleurs puisées dans son enfance et consolidées par une hypocondrie incommensurable, qui a fait couler beaucoup d’encre, étonner plus d’un spécialiste de l’univers mental et fait fantasmer encore plus les musiciens et les mélomanes reconnaissant son unicité d’invention. Étrange personnage illustre et incomparable, fragile et sublime, pour lequel névrose et génie se confondent plus que chez tous les autres grands créateurs dont il faudrait louer la folie pour tenter de comprendre leur talent.

« Sous l’impulsion de sa mère qui rêvait d’être concertiste, Glenn Gould commence le piano dès l’âge de deux ans et demi, et s’y révèle aussitôt très doué. Il lit la musique avant même de savoir lire et écrire. Devenu adulte, il va totalement révolutionner la façon de jouer du piano, et vendre autant de disques que les plus grandes rock star. Mais plus le public l’acclame, plus Glenn en souffre, car sa personnalité asperger et hypocondriaque lui rend chaque concert extrêmement pénible et douloureux. Sans parler de sa vie privée, totalement sacrifiée… C’est l’histoire du destin extraordinaire et tragique d’un des plus grands artistes du 20ème siècle. »

Naissance d’un prodige, d’un génie, d’un créateur, le spectacle nous parle de l’interprète bien sûr, inventeur inégalé, au jeu pianistique innovant impliquant le corps dans son entièreté, le mental bien sûr et le désir aussi. Mais aux côtés de l’interprète, nous devinons l’enfant étouffé par l’exclusivité d’une mère possessive et prescriptive, et l’adulte empêché dans sa vie d’homme qui ne trouvera que dans le repli de la solitude le refuge de peurs grandissantes devenues phobiques.

La pièce interroge, chemin faisant, les fondements de l'expression artistique, ses motivations et sa destination. Elle convoque la question récurrente qui écartèle le respect de la tradition, de sa transmission et la place laissée à l’innovation, à la créativité dénuée des étais du passé.

L’écriture documentée et sensible du texte par Ivan Calbérac, enveloppée de nuées musicales impressionnantes tirées de la discographie du héros, nous captive par son récit et la peinture ciselée des personnages qui l’animent.

La mise en scène de l’auteur apporte une attention au fil narratif en dirigeant l’interprétation des rôles afin que rien d’inutile ne vienne gêner son parcours discursif. L’impact est total. Les effets sont réussis. La scénographie de Juliette Azzopardi et les costumes de Bérangère Roland, les lumières de Alban Sauvé et la vidéo de Nathalie Cabrol soignent avec précision et efficacité une esthétique d’ensemble belle et efficace.

La distribution est remarquable. Josiane Stoleru, Bernard Malaka, Thomas Gendronneau, Lison Pennec, Benoit Tachoires et Stéphane Roux apportent chacune et chacun leur contribution pour faire de ce spectacle un tourbillon envoûtant, nous emportant dans un récit prenant et troublant. L’émotion passe la rampe, nous sommes cueillis, touchés, soulevés par cette histoire que nous pouvons voir romanesque et dont la portée documentariste s’impose et ravit tout autant l’attention.

Un spectacle prégnant et captivant, mis en vie avec finesse et interprété merveilleusement. Un très beau temps de théâtre à voir sans hésiter.

Spectacle vu le 21 juillet 2022

Frédéric Perez

 

Écriture et mise en scène de Ivan Calbérac, assisté pour la mise en scène par Florence Mato. Scénographe de Juliette Azzopardi Lumières de Alban Sauvé. Vidéo de Nathalie Cabrol. Costumes de Bérangère Roland.

Avec Josiane Stoleru, Bernard Malaka, Thomas Gendronneau, Lison Pennec, Benoit Tachoires et Stéphane Roux.

 

 

Jusqu’au 30 juillet à 11h50

(relâche le mardi)

 

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