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Un spectacle qui dépeint avec une force de suggestion violente la décharge psychologique d'un couple dont l’épuisement du quotidien éclate. Une dramaturgie finement élaborée qui avance imperturbablement dans une sorte de fuite en avant parsemée de dérapages incontrôlés formidablement spectaculaires. Il y a là une façon de thriller cocasse, drôle et inattendu.

« Marie et Adam vivent cloîtrés dans leur appartement. Alors que tout est prétexte à dispute, l'arrivée d'un étrange colis qui n'est pas à leur nom va les forcer à collaborer. Il leur faut retrouver ses véritables propriétaires et vite ! Car à mesure que le nombre de colis grossit de plus en plus, ces derniers ont tout l'air de vouloir prendre leur place ».

Marie et Adam forment un couple prisonnier de lui-même qui mène une joute permanente dont la colère sourde explose à chaque détour de situation. Un mot, un geste, un regard, un peu déplacés dans l’aire de l’autre et c’est la mèche de trop qui enflamme un brasier de délires, c’est un volcan d’intolérances qui implose, un trop-plein de nombreux « j’en-peux-plus » irrités qui s’entrechoquent aux « fous-moi-la-paix » irritables.

Est-ce que Marie et Adam se haïssent ou s’aiment ? peut-être oui et non. Leur relation porte une ambivalence dans son apparence tant elle est proche de celles fusionnelles que nombre de couples ont vécu pendant les confinements de la crise sanitaire.

Est-ce que Marie et Adam jouent entre eux à une sorte de cache-tampon de la charge mentale imputée à l’autre ? sans doute. Il semble leur être difficile de se supporter mais impossible de faire l’un sans l’autre.

Mais est-ce que Marie et Adam sont bien Marie et Adam finalement ? le savent-ils eux-mêmes ? n’auraient-ils pas dépasser un stade de l’épuisement qui les conduirait à douter du réel ? ne seraient-ils pas en train de le sublimer dans un imaginaire vivant mais factice, un surréalisme factuel et naturaliste où les choses se confondent aux hallucinations et leurs matérialités s’effacent devant de nouvelles ?

En serait-il de même pour leurs propres identités ?

Rêve ou folie ? Désir ou nécessité ?

La pièce de Idir Chender et Anne-Clotilde Rampon est adroitement écrite, le fil narratif savamment dessiné. L’histoire nous prend au premier degré d’abord puis nous conduit ailleurs, sur un chemin de ruptures et de détachements de repères. C’est très bien fichu, prégnant et proche au début puis autrement ensuite.

La mise en scène et la direction de jeux de Idir Chender donnent une peinture réaliste des situations, apportant peu à peu les effets de surprise et installant ainsi, sournoisement presque, le tourbillon glissant dans lequel nous sommes entrainés.

Les comédiens sont à leur aise. Impressionnants d’évidence et de nuances dans leur interprétation, Mathilde Weil et Max Millet sont tout simplement brillants dans cette partition complexe qu’elle et il rendent aisément captivante.

Une histoire singulière, un spectacle drôle et original mis en vie avec brio. Je recommande cette découverte.

Spectacle vu le 29 avril 2023

Frédéric Perez

 

De Idir Chender et Anne-Clotilde Rampon. Mise en scène de Idir Chender. Collaboration artistique de Anissa Bennacer.

Avec Mathilde Weil et en alternance, Max Millet ou Idir Chender.

 

 

Les samedis à 19h00

77 rue de Charonne, Paris 11ème

01.40.09.70.40 www.theatrelafleche.fr

 

Photos © Marie Charbonnier
Photos © Marie Charbonnier
Photos © Marie Charbonnier
Photos © Marie Charbonnier

Photos © Marie Charbonnier

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