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Une création étonnante et riche. Une proposition innovante pour ne pas dire insolite de mise en vie du célèbre roman de « La Dame aux Camélias ». Sans doute une gageure de se confronter à l’adaptation du roman alors que l’auteur, Dumas fils lui-même, en a écrit une pièce. Sans aucun doute une réussite de l’avoir fait.

« Dans le demi-monde parisien chic des années 1850, où se côtoient riches amateurs et femmes légères, le jeune Armand Duval tombe amoureux de la jeune et belle Marguerite Gautier, une des reines de ce monde éphémère de la noce. Armand, devenu l'amant de Marguerite, obtient d'elle qu'elle renonce à sa vie tapageuse pour se retirer avec lui à la campagne. Mais la liaison est menacée par le père d'Armand, qui obtient de Marguerite qu'elle rompe avec son fils. Jusqu'à la veille de la mort de Marguerite, atteinte de tuberculose, Armand sera persuadé qu'elle l'a trahi avec un nouvel amant, et quitté volontairement…»

L’adaptation théâtrale de Jean-François Labourdette et Jean-Marie Ledo restitue sans aucun excès de lyrisme les flux et les reflux de l’histoire en respectant tout en se l’appropriant la figure de style de la double narration utilisée dans l’œuvre originale.

Nous entrons dans la salle alors qu’au centre du plateau une femme est assise dans un fauteuil, dos au public, lascive ou morte, est-ce Marguerite ? On ne sait pas, on comprendra plus tard sans doute. Un homme entre côté jardin et s’adresse aussitôt à nous, un cartable à la main. La narration commence, le spectacle s’ouvre. Alors qu’il nous parle, Armand le rejoint et échange avec lui, la double narration s’établit. Le narrateur sort son carnet, les personnages entrent tour à tour, le spectacle est commencé.

Évitant à l’argument de sombrer dans un sentimentalisme vain et usé, cette version inédite laisse place adroitement et centralement à la tension vibrante et touchante de cette passion qui outrepasse la raison, jusqu’à rendre belle et émouvante cette adoration réciproque, folle et entière. Un amour empêché et improbable pourtant vraisemblable dans le contexte de la vie parisienne mondaine du milieu du 19ème siècle.

L’écriture est habile. Les rôles sont décrits avec clarté, leurs contours dessinés précisément. Chaque pièce de cette sorte d’échiquier vivant se distingue et se meut avec évidence, suivant le fil narratif simple et chronologique de ce grand jeu d’échec de l’amour.

La mise en scène épurée de Jean-Marie Ledo construit un patchwork de tableaux qui se suivent ou se chevauchent au gré du texte dit ou joué. Une mise en scène et des indications qui servent le texte sans faille ni doublons fictionnels ajoutés et qui donne à la distribution des moments de jeux pertinents et nourris.

Un troupe cohérente et complémentaire, composée par Ronan Carretti, Romain Châteaugiron, Jean-François Labourdette, Jean-Marie Ledo, Laurent Moulin, Maïna Louboutin, Michelle Sevault et Natacha Simic.

Comment ne pas relever la prestation de Natacha Simic dans le rôle-titre. Un rôle en or pour une comédienne brillante qui nous offre ici une interprétation qui se rapproche plus de l’incarnation signifiante du personnage. Admirable. Elle ne joue pas Marguerite, elle est Marguerite. Sa souffrance est crédible et sa douleur émouvante. Elle porte et emporte le récit de bout en bout jusqu’à le rendre touchant. Ses duos avec Armand (Romain Châteaugiron) sont particulièrement convaincants. Elle et il donnent une force ténue mais vibrante et une belle véracité à la complicité interdite des deux amants.

Une adaptation remarquable de cette histoire d’amour légendaire, toujours aussi vivace et touchante. Le romantisme est au rendez-vous de ce spectacle bien écrit et joué efficacement, coloré avec grâce et brio par la comédienne Natacha Simic, magnifique Dame aux Camélias.

 

Spectacle vu le 23 janvier 2022

Frédéric Perez

 

D’après Alexandre Dumas fils. Adaptation de Jean-François Labourdette et Jean-Marie Ledo. Mise en scène de Jean-Marie Ledo. Collaboration artistique de Manon Chaumont et Jérôme Viard.

Avec Ronan Carretti, Romain Châteaugiron, Jean-François Labourdette, Jean-Marie Ledo, Laurent Moulin, Maïna Louboutin, Michelle Sevault et Natacha Simic.

 

 

Jusqu’au 10 avril

Les dimanches à 20h00

15 rue du Maine, Paris 14ème

01.43.27.88.61  www.guichetmontparnasse.com

 

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