JE M'APPELLE ASHER LEV au théâtre des Béliers Parisiens

Un spectacle prégnant, piqué d’humour, qui dépeint le combat entre la prescription familiale et le projet personnel, entre le diktat de conformité et le désir de s’émanciper, drainant ce-faisant un questionnement sur l’art et la religion.

« Asher Lev dessine comme il respire. C’est l’histoire d’un jeune juif orthodoxe de Brooklyn, qui, aux portes du monde prodigieux de l’art, devra choisir : Obéir aux exigences des siens et à son éducation religieuse ou s’abandonner à son destin exceptionnel. »

Plaisir ou soumission ? Besoin ou nécessité ? Sentiment d’appartenance ou sentiment de soi ? Lorsque la fiction dramatique pose ces interrogations au travers de ce qu’elle illustre, le public est invité à se faire témoin ou cible, profondément concerné ou simplement observateur. Quelle que soit la posture, nous sommes et resterons touchés, toutes et tous, par les affres labyrinthiques des choix de vie ainsi exposés.

Le texte décrit habilement cet exposé des méandres de la croyance dans les valeurs morales ou esthétiques et les fondements de l'identité jusqu'à les faire se confronter dans une opposition. Le choix de l’écriture alternant la narration et les scènes jouées donne aux relations entre les protagonistes un éclat dans leurs révélations et aux propos du personnage-titre une force dans la confidence et la mise en évidence de l’évolution de sa personnalité.

La mise en scène de Hannah-Jazz Mertens et la scénographie de Capucine Grou-Radenez cultivent une esthétique douce et veloutée, confortée par les lumières de Bastien Gérard jouant sur les clairs-obscurs et les plongées. Le récit imprègne l’écoute et le regard, et répand en permanence une puissance émotionnelle forte qui subjugue et ravit.

L’interprétation est impressionnante, crédible et convaincante. Guillaume Bouchède, Stéphanie Caillol et Benoît Chauvin (ce soir) rivalisent de talents dans les nuances d’émotions qu’elle et ils apportent à leurs personnages. Leur engagement total délivre des jeux délicats et vifs. De superbes comédiens pour de superbes rôles.

Un spectacle à voir assurément, pour le plaisir d’assister à cette alliance finement élaborée entre la raison et l’émotion. Un temps de théâtre intelligent, touchant et agréable.

Spectacle vu le 30 janvier 2024

Frédéric Perez

D’après la pièce de Aaron Posner adaptée du roman du Chaïm Potok. Adaptation française et mise en scène de Hannah-Jazz Mertens. Assistante mise en scène, Jade Molinier. Musique, Anne-Sophie Versnaeyen. Scénographie, Capucine Grou-Radenez. Lumières, Bastien Gérard. Costumes, Bérengère Roland.

Avec Guillaume Bouchède, Stéphanie Caillol, Martin Karmann ou Benoît Chauvin.